Une note sur la langue
Dans cette trousse, nous utiliserons parfois le mot femme et les pronoms féminins par souci de simplicité et pour reconnaître l’impact significatif de la violence facilitée par la technologie sur les femmes et les filles. Nous reconnaissons que la VFGFT a également un impact sur les personnes trans, non binaires et bispirituelles. Nous espérons que toutes les personnes touchées par la VFGFT trouveront ces documents utiles.
Contexte
La violence fondée sur le genre facilitée par la technologie (VFGFT) est souvent utilisée pour perpétuer les préjudices subis par les femmes et comprend de nombreux comportements extrêmement nuisibles. 1 Si vous ou une personne de votre entourage êtes victime de VFGFT, vous avez plusieurs options juridiques qui peuvent contribuer à votre sécurité et à établir la responsabilité de l’auteur. Il importe de garder à l’esprit que la loi n’est qu’un moyen parmi d’autres de lutter contre la VFGFT. Le fait de signaler la violence à la police ou d’entamer une action en justice peut parfois conduire à une escalade. Il est recommandé de prendre contact avec une organisation antiviolence afin d’examiner les options qui s’offrent à vous tout en préservant votre sécurité. Consulter Sécurité technologique et ressources pour les victimes et les survivantes. Hébergement femmes Canada a également créé une Liste de contrôle pour la planification de la sécurité technologique et une Trousse de planification de la sécurité que vous pouvez consulter vous-même ou avec une intervenante antiviolence avant d’entamer des recours juridiques.
Il n’existe pas de loi spécifique contre la VFGFT. Par contre, bon nombre des comportements visés par ce terme, tels que le harcèlement, la traque furtive et la diffusion non consensuelle d’images intimes, sont des comportements criminels ou peuvent constituer la base d’une action civile à l’encontre de l’auteur.
Cette trousse donne un aperçu général des deux principaux systèmes juridiques au Canada: le système de justice pénale et le système civil, qui comprend le droit de la famille. Le système que vous choisissez d’utiliser en réponse à la VFGFT aura une incidence sur votre rôle dans la procédure judiciaire et sur les recours disponibles. Le document explore ensuite deux catégories principales de VFGFT: le harcèlement (y compris la traque, l’espionnage et les menaces) et la violence par les images. D’autres liens figurent ci-dessous sur les recours juridiques appropriés pour faire face à certains comportements.
La trousse Recours juridiques en cas de VFGFT vise à fournir des informations générales: il ne s’agit pas d’une liste détaillée de toutes les lois susceptibles de s’appliquer aux diverses formes de VFGFT et ne constitue pas un avis juridique. Vous devriez envisager de consulter un·e avocat·e si vous souhaitez exercer l’un des recours juridiques détaillés dans le présent document. Voir aussi: Soutiens et ressources juridiques et de services aux victimes.
Si vous avez des doutes quant à la signification d'un mot utilisé dans ce document, veuillez consulter Définitions des termes juridiques: Droit civil et droit de la famille et Définitions des termes juridiques: Droit pénal.
Le système pénal
Le système pénal comprend des infractions définies dans le Code criminel du Canada. Si une personne enfreint l’une des lois énoncées dans le Code, son comportement peut être signalé à la police (locale ou GRC, selon le lieu), qui peut enquêter et établir si un délit a été commis. La police fait ensuite rapport à la Couronne, qui représente le public canadien, et qui décide s’il y a lieu ou non d’engager des poursuites. Si la personne (désormais appelée «accusé») est inculpée par la Couronne, elle peut plaider non coupable, ce qui signifie qu’un procès aura lieu, ou plaider coupable et passer directement à la détermination de la peine. Lors d’un procès, le ministère public et l’accusé présentent toutes les preuves pertinentes devant un juge ou un jury qui décident si l’accusé est coupable (condamné) ou innocent (acquitté). Si l’accusé est acquitté, il est libre de partir. Tout accusé reconnu coupable sera condamné, c’est-à-dire qu’un juge décidera de la peine encourue pour son comportement, qui peut aller jusqu’à l’emprisonnement. Pour les définitions de certains termes juridiques courants utilisés en droit pénal, voir Définitions de termes juridiques: Droit pénal.
Pour augmenter les chances d’inculpation, vous devez rassembler un maximum de preuves de VFGFT, y compris des preuves numériques. Pour plus d’informations, consultez la trousse: Préservation des preuves numériques. Vous devrez apporter toutes les preuves que vous détenez, y compris les preuves numériques, lorsque vous signalerez le délit à la police. Il peut être utile d’imprimer les preuves et d’en avoir des copies numériques sur une clé USB pour les remettre à la police. Veillez à créer une copie des preuves conservées et dressez une liste de celles que vous avez fournies à la police. Renseignez-vous également sur les lois pouvant avoir un lien avec le crime, afin de pouvoir dire à la police de quoi vous pensez que l’auteur est coupable. Cette trousse vise à vous informer sur les lois pénales qui peuvent s’appliquer à votre situation. Toutefois, c’est la police qui devra déterminer si certaines d’entre elles ont été enfreintes. La police décidera des délits à reprocher à l’auteur s’il y a suffisamment de preuves pour le faire. Elle peut même identifier des lois que vous n’aviez pas envisagées.
Si vous êtes victime de VFGFT et que vous décidez de faire un signalement à la police, vous devez savoir qu’il n’y a aucune garantie que cela aboutisse à des poursuites pénales, car la police ou la Couronne peuvent décider de ne pas donner suite à l’affaire. Même si des poursuites sont engagées, il se peut qu’il n’y ait pas de condamnation, car l’accusé peut trouver un arrangement, les poursuites peuvent être abandonnées ou l’accusé acquitté.
Si le ministère public engage des poursuites contre l’accusé, vous ne serez pas considéré comme une «partie» à la procédure comme ce serait le cas dans une affaire de droit civil (voir ci-dessous). Vous êtes une «plaignante» et techniquement, simple témoin du crime. Le litige dans une affaire pénale oppose la Couronne (qui représente le public canadien) et l’accusé. Vous n’aurez pas l’occasion de vous faire représenter par un·e avocat·e ni de gérer vous-même votre propre dossier. 22 Le procureur de la Couronne n’est pas votre avocat·e, mais représente l’intérêt public. Le secret professionnel ne s’applique pas à vos conversations avec leur équipe. Ils ont en outre le devoir de divulguer les informations que vous partagez avec eux avec la partie adverse si elles sont pertinentes à l’affaire. Demandez-leur d’expliquer leurs responsabilités en matière de divulgation avant de fournir des preuves.
S’il y a procès, vous serez appelée par le ministère public à témoigner sur l’infraction, notamment en identifiant et en expliquant tout élément de preuve pertinent (voir Présentation de preuves au tribunal et Authentification des preuves numériques). Vous serez soumise à un contre-interrogatoire par l’accusé ou son avocat·e, ce qui peut être une expérience très pénible.
Si l’accusé est reconnu coupable, il est possible que vous receviez une petite somme d’argent. Toutefois, le principal recours possible dans le cadre de la procédure pénale est la restriction de la liberté de l’accusé par l’incarcération (prison) ou l’imposition de conditions.
Le système civil
Dans le système civil, c’est généralement une personne (le «plaignant») qui porte plainte contre une autre personne (le «défendeur»), et non la Couronne contre un individu comme dans le système pénal. Le système du droit de la famille fait partie du système civil parce qu’il implique deux personnes en conflit l’une avec l’autre, bien qu’il traite de types spécifiques de questions et de requêtes (comme la garde des enfants). Pour les définitions de certains termes juridiques courants utilisés en droit civil et en droit de la famille, voir Définitions des termes juridiques: Droit civil et droit de la famille.
Si le droit pénal s’applique à l’ensemble du Canada, le droit civil varie considérablement d’une province ou d’un territoire à l’autre. Il est donc important de vous familiariser avec le droit applicable dans votre juridiction. Certains recours civils sont régis par des législations provinciales ou territoriales, telles que le droit de la famille ou le droit à la vie privée. Les autres recours civils sont régis par ce que l’on appelle la «common law», c’est-à-dire la jurisprudence basée sur les décisions antérieures des juges de cette province.
Contrairement au système pénal, dans le système civil, vous êtes considéré comme une partie à la procédure, ce qui signifie que vous pouvez être représentée ou vous représenter vous-même. Si vous le pouvez, il est fortement recommandé de faire appel à un·e avocat·e dans les procédures civiles relatives à la VFGFT, car la loi est très compliquée et le fait de se représenter soi-même peut être source de confusion et demander un travail considérable. Consulter: Soutiens et ressources juridiques et de services aux victimes.
Si vous vous représentez vous-même, on attendra de vous que vous meniez votre affaire, notamment en rassemblant et en soumettant toutes les preuves pertinentes, en interrogeant les témoins et en présentant des observations. Si vous vous représentez vous-même, vous devriez consulter la trousse Préservation des preuves numériques pour des informations sur la manière de traiter les preuves numériques lors du procès. Vous pouvez également consulter les guides du Conseil canadien de la magistrature à l’intention des personnes non représentées: Manuel de droit civil et Manuel de droit de la famille.
Une plainte contre quelqu’un devant un tribunal civil ne peut pas entraîner son emprisonnement. Les recours disponibles dans un procès civil sont généralement limités à des paiements monétaires (appelés «dommages-intérêts»), ou à des injonctions qui visent à empêcher le défendeur d’adopter un comportement néfaste continu. D’autres recours peuvent être disponibles en fonction du type de plainte que vous déposez concernant la VFGFT.
Recours juridiques contre la VFGFT
La VFGFT englobe un large éventail de comportements dont la plupart relèvent de deux catégories principales: le harcèlement (y compris la traque, l’espionnage et les menaces) et la violence par les images (y compris le voyeurisme, la diffusion non consensuelle d’images intimes [pornographie de vengeance] et d’autres comportements liés à l’exploitation de votre image). Dans la VFGFT, l’auteur utilise les technologies numériques pour nuire à une autre personne. Étant donné l’importance des technologies numériques dans notre vie quotidienne, de nombreuses formes de comportements violents et préjudiciables ont désormais une composante technologique.
Les auteurs se livrent souvent à plusieurs formes de VFGFT en même temps, souvent en combinaison avec des actes de violence ou d’intimidation en personne ou dans «le monde réel». Les catégories ci-dessous se chevauchent souvent et les deux catégories clés elles-mêmes peuvent se recouper. Par exemple, si une personne menace de partager des images intimes de vous sur Internet dans un contexte élargi de harcèlement, il s’agirait à la fois d’abus et de violence par les images.
Lorsque vous envisagez une procédure juridique pour la VFGFT, vous devez savoir que de nombreuses lois pénales ou civiles peuvent s’appliquer. Dans la mesure du possible, il est utile de demander des conseils et des informations à une intervenante ou à un·e avocat·e. Consulter: Sécurité technologique et ressources pour les victimes et les survivantes, et Soutiens et ressources juridiques et de services aux victimes.
Harcèlement, traque, espionnage et menaces
Dans la vie de tous les jours, la VFGFT implique des technologies numériques pour traquer, harceler ou menacer les survivantes. Ce genre de comportements se produisent souvent dans le cadre d’une relation intime ou après une rupture. Par exemple, un auteur de violence qui:
- Vous contacte constamment par des appels, des SMS, des messages sur les médias sociaux, etc.
- Profère des menaces explicites ou implicites à votre encontre ou cible vos proches sur le Web ou par le biais de SMS
- Publie des informations préjudiciables à votre sujet sur les médias sociaux, un blog ou un site
- Traque vos communications ou votre localisation en installant un logiciel espion sur votre téléphone ou en plaçant un traceur GPS dans votre voiture
- Restreint l’accès à vos appareils numériques, vous bloque de vos comptes ou interfère avec vos appareils connectés et domotique
- Se fait passer pour vous en ligne en créant de faux profils de rencontres ou de fausses publicités pour des services sexuels, ou en créant de faux comptes de médias sociaux
Les exemples ci-dessus ne sont que quelques des types de comportements qui peuvent entrer dans cette catégorie. La VFGFT comprend tout comportement de harcèlement, de traque, de menace, d’intimidation, d’usurpation d’identité ou tout autre préjudice de la part de l’auteur, en ligne ou par le biais des technologies numériques.
Si vous avez été la cible de harcèlement, d’espionnage ou de comportements menaçants, plusieurs recours juridiques peuvent s’appliquer. Le Code criminel interdit de nombreuses formes de harcèlement, de menaces et d’extorsion. Les recours civils peuvent inclure des poursuites pour diffamation ou pour infliction intentionnelle de détresse mentale. Pour plus d’informations sur vos options juridiques, voir Recours juridiques en cas de harcèlement, de traque, d’espionnage et de menaces en ligne.
Si vous craignez pour votre sécurité immédiate, vous devez contacter la police. Vous pouvez également demander un engagement de ne pas troubler l’ordre public ou, si l’auteur est un membre de la famille (conjoint ou ex-conjoint), une ordonnance de protection aux termes du droit de la famille. Ces ordonnances ont pour but d’empêcher les auteurs de se livrer à des actes violents ou criminels à l’avenir. Pour plus d’informations, voir «Engagements de ne pas troubler l’ordre public et ordonnances de protection pour les victimes de VFGFT».
Violence par les images
La violence par les images englobe un large éventail de comportements impliquant un auteur qui enregistre ou distribue des images à caractère sexuel de ses victimes. Cette catégorie peut inclure:
- Un ancien partenaire met en ligne des images intimes de vous qu’il a prises ou que vous lui avez envoyées pendant la relation (parfois appelé «pornographie de vengeance»).
- Un auteur place des caméras cachées dans des endroits où vous pourriez être nue ou en activité sexuelle, comme votre chambre à coucher ou votre salle de bains.
- Un auteur menace de diffuser vos images intimes à moins que vous ne fassiez quelque chose ou pour vous empêcher de faire quelque chose (lorsque les demandes sont d’ordre sexuel, ce comportement est parfois appelé «sextorsion»).
- Un auteur se filme en train de vous agresser sexuellement ou met en ligne des images d’une agression sexuelle.
Ce ne sont que quelques exemples qui peuvent entrer dans cette catégorie de VFGFT. En outre, il existe de nombreuses lois pénales spécifiques visant les comportements impliquant des images à caractère sexuel de mineurs.
Si un auteur vous a enregistré dans un contexte sexualisé sans votre consentement ou vous a menacée d’utiliser vos images contre vous, plusieurs recours juridiques peuvent s’appliquer. Le Code criminel interdit la diffusion non consensuelle d’images intimes, le voyeurisme (enregistrement secret) et l’extorsion, ainsi que de nombreuses infractions lorsqu’une personne enregistre ou distribue des images à caractère sexuel d’une personne mineure ou tente de la contraindre à un comportement sexuel en ligne. Les recours civils peuvent inclure des poursuites pour violation des droits d’auteur, de la vie privée ou de la confidentialité. Pour plus d’informations sur vos options juridiques, voir Recours juridiques en cas de violence par les images.
Si vous craignez pour votre sécurité immédiate ou si vous craignez que quelqu’un ne diffuse vos images intimes sans votre consentement, vous devez contacter la police. Vous pouvez également demander un engagement de ne pas troubler l’ordre public ou, si l’auteur est un membre de la famille (conjoint ou ex-conjoint), une ordonnance de protection aux termes du droit de la famille. Ces ordonnances ont pour but d’empêcher les comportements violents ou criminels. Pour plus d’informations, consulter «Engagements de ne pas troubler l’ordre public et ordonnances de protection pour les victimes de VFGFT).
La violence fondée sur le genre facilitée par la technologie (VFGFT) fait partie d’un continuum de violence qui peut se produire à la fois en ligne et en personne. Si vous ou l’une de vos connaissances faites face à la VFGFT, vous n’êtes pas seule. Vous pouvez consulter hebergementfemmes.ca pour trouver une maison d’hébergement près de chez vous ou appeler ou envoyer un message texte à Jeunesse, J’écoute pour discuter de vos options et créer un plan de sécurité. Vous n’avez pas besoin de résider dans une maison d’hébergement pour accéder à un soutien et à des services gratuits et confidentiels.
Nous remercions Moira Aikenhead pour l’expertise qu’elle a apportée à la mise à jour de cette trousse à outils, ainsi que Suzie Dunn et Rachel Sombach du Projet eQuality de l’Université d’Ottawa pour leur expertise et leurs conseils lors de la création de cette fiche d’information.
Adapté avec la permission du projet Technology Safety de la BCSTH, d’après leur ressource Legal Remedies for Canadian Women Experiencing Technology Facilitated Violence.
- Dans la présente trousse, nous utiliserons parfois le mot femme et des pronoms féminins par souci de simplicité et pour reconnaître l’impact significatif de la violence facilitée par la technologie sur les femmes et les filles. Nous reconnaissons que la VFGFT a également un impact sur les personnes trans, non binaires et bispirituelles. Nous espérons que toutes les personnes touchées par la VFGFT trouveront ces documents utiles.
- Les victimes d’agression sexuelle font exception à cette règle. Les victimes d’agressions sexuelles peuvent faire appel à un·e avocat·e pour présenter des arguments au tribunal lorsque l’accusé tente d’obtenir l’accès à leurs dossiers personnels (tels que les dossiers thérapeutiques ou les SMS). En vertu de l’article 278.4 du Code criminel, vous pouvez vous faire représenter par un·e avocat·e pour vous opposer à cette demande. Vous n’êtes autorisée à vous faire représenter que pour cette question spécifique et vous ne serez pas représentée pendant le reste du procès.