Les SMS: Guide pour les organisations antiviolence
Une note sur la langue
Dans cette trousse, nous utiliserons parfois le mot femme et les pronoms féminins par souci de simplicité et pour reconnaître l’impact significatif de la violence facilitée par la technologie sur les femmes et les filles. Nous reconnaissons que la VFGFT a également un impact sur les personnes trans, non binaires et bispirituelles. Nous espérons que toutes les personnes touchées par la VFGFT trouveront ces documents utiles.
Avantages des SMS pour communiquer avec les survivantes
Les textos sont un moyen efficace de rester en contact et maintenir l’engagement des survivantes. Ils peuvent également être utiles lorsqu’une survivante a besoin d’informations rapidement et ne peut pas parler au téléphone. Un SMS est parfois plus fiable qu’un appel téléphonique. C’est la meilleure forme de communication en complément à une rencontre en personne ou un appel téléphonique. Les communications par SMS entre le personnel et les survivantes peuvent poser problème en raison des enjeux de sécurité et de confidentialité évoqués ci-dessous. C’est pourquoi le personnel devrait vérifier régulièrement les considérations relatives à la confidentialité et à la sécurité et explorer des stratégies sécuritaires pour l’envoi de SMS.
Sécurité et confidentialité lors de l’envoi de SMS aux survivantes
Documentation
Contrairement à un échange de vive voix, les SMS laissent un historique complet de la conversation. Une personne qui accède au téléphone d’une survivante peut lire la conversation en entier. Cela peut comporter des risques considérables. Quant au personnel, le téléphone contient également un historique de la conversation, qui pourrait être accessible par des collègues ou des tierces parties ayant accès au téléphone.
Usurpation d’identité
Il est difficile de savoir si la personne avec laquelle vous échangez des SMS est bien la survivante et non quelqu’un qui se fait passer pour elle. Les téléphones mobiles sont petits et facilement accessibles par des colocataires, des proches, la famille et même l’auteur de violence. Si le téléphone de la survivante n’a pas de code de sécurité (ou si quelqu’un connaît le code), le téléphone est accessible, autant pour consulter les SMS que pour y répondre.
Mauvaise communication
Les SMS n’ont pas les nuances des communications en personne ou par téléphone. Ce qui peut être transmis par le langage corporel ou le ton de la voix n’apparaît pas dans les SMS qui peuvent être perçus comme trop brefs, insensibles, ou simplement confus. Le personnel peut éprouver des difficultés à comprendre les intentions de la survivante. En outre, les nombreux acronymes et abréviations fréquemment utilisés peuvent signifier des choses différentes pour la personne qui l’envoie et celle qui le reçoit.
Pratiques de SMS pour le personnel antiviolence
Utiliser un téléphone de l’organisation
Il est préférable d’utiliser un téléphone appartenant à votre organisation pour envoyer des SMS ou appeler les survivantes. Vos politiques de confidentialité doivent régir l’utilisation des téléphones professionnels. L’emploi d’un téléphone personnel pour communiquer avec les survivantes pose d’importants problèmes de confidentialité et de respect de la vie privée. Ces préoccupations sont détaillées ci-dessous. Voir également Appareil mobile: Guide pour les organisations antiviolence sur les meilleures pratiques de téléphonie mobile.
Limiter les informations sur les survivantes dans les contacts
Enregistrez le moins d’informations possible et, une fois la communication terminée, effacez les coordonnées du téléphone.
Supprimer l’historique des SMS
Le cas échéant, envisagez d’effacer périodiquement les conversations, afin que le téléphone ne stocke pas des mois (voire des années) de SMS entre survivantes et personnel.
Vérifier régulièrement la sécurité et la protection de la vie privée
Il est facile de se sentir à l’aise avec les SMS et de supposer que la personne avec laquelle on texte est une survivante. Prenez des nouvelles de la personne que vous soutenez par d’autres moyens, comme un appel téléphonique, un chat vidéo ou, si possible, une rencontre en personne.
Possibilité de mauvaise communication
Comme dans les courriels, il est facile de rater ou de mal interpréter l’aspect émotionnel des SMS. Assurez-vous que les communications soient utiles et productives.
Fixer des attentes et des limites
Avant de texter, discutez toujours avec la survivante du moment approprié de le faire. Fixez des limites et des attentes: quand vous êtes disponible, quand vous pouvez ou ne pouvez pas répondre et quelles sont les ressources disponibles après les heures de travail.
Suggestions de planification de sécurité pour l’envoi de SMS aux survivantes
Recommander la suppression des journaux de SMS
Parlez aux survivantes de la suppression des SMS envoyés et reçus, ainsi que du journal où figure le numéro de l’organisation, afin d’améliorer la sécurité.
Déterminez ensemble s’il est prudent de conserver le nom et le numéro de téléphone du personnel de liaison dans ses contacts
Si un auteur surveille son téléphone (en personne ou à distance), il n’est peut-être pas prudent d’enregistrer le nom et le numéro de téléphone de l’intervenante dans ses contacts. Cette conversation peut faire partie d’un plan de sécurité.
Encourager les survivantes à entretenir des contacts réguliers avec vous
Étant donné que les SMS ne sont pas la meilleure méthode pour communiquer sur la planification de sécurité et les facteurs de risque, encouragez les survivantes à vous contacter en utilisant d’autres méthodes, comme un appel téléphonique ou vidéo, ou une réunion en personne.
Risques pour la sécurité et la confidentialité liés à l’utilisation de téléphones personnels pour envoyer des SMS
Si des SMS sont envoyés par l’entremise d’un téléphone personnel, il faut tenir compte des enjeux de sécurité et de confidentialité qui en découlent:
- La survivante verra le numéro personnel de l’intervenante. Contrairement aux appels téléphoniques, vous ne pouvez pas rendre votre numéro «privé». Cela pourrait poser un problème de sécurité si l’auteur de violence découvre le numéro de l’employée. Il peut également être difficile pour le personnel de fixer des limites respectant sa disponibilité.
- L’utilisation de leur téléphone personnel peut permettre à des tiers, la famille et des proches d’accéder à des SMS confidentiels entre le personnel et une survivante. Il peut s’agir d’une violation en vertu de certaines lois sur la protection de la vie privée.
- Si le personnel stocke des SMS confidentiels sur un appareil, celui-ci peut être cité à comparaître si les parties estiment que le téléphone contient des informations pertinentes pour une procédure judiciaire.
- Si quelqu’un quitte son emploi, l’organisation perd le contrôle de toutes les informations stockées sur un téléphone qui ne lui appartient pas.
Applis/services de messagerie tiers
En raison du manque de confidentialité inhérent à l’envoi de SMS, certaines organisations utilisent des applis tierces. Certaines permettent de faire disparaître les SMS après un certain temps et offrent un cryptage plus sécuritaire. L’utilisation de ces services tiers présente des avantages et des inconvénients.
Parmi les avantages, ces applis/services offrent des fonctionnalités additionnelles:
- Les messages peuvent être programmés pour disparaître après une certaine période.
- Niveau de cryptage rendant les messages moins vulnérables au «piratage»
- Accès au service à partir d’une tablette, d’un ordinateur ou d’un autre téléphone (peut s’avérer utile si le téléphone d’une survivante a été compromis ou si elle se procure un nouvel appareil).
- Il peut s’agir d’une autre méthode de communication si l’auteur de violence surveille les messages.
Risques posés par ces applis/services:
- Le téléchargement d’une appli/service de messagerie peut s’avérer peu pratique ou dangereux si un auteur surveille les applis et les services téléchargés.
- La plupart (voire la totalité) des applis/services de messagerie tiers exigent de créer un compte. En fonction de la configuration du compte, l’auteur de violence peut être informé qu’un nouveau service a été téléchargé.
- Les applis/services étant accessibles via différents appareils, si l’auteur a accès aux appareils et aux mots de passe de la survivante, il peut surveiller ses SMS sans avoir directement accès à son téléphone. Veillez à vérifier les paramètres de sécurité et de confidentialité de ces applis pour vous assurer que personne d’autre n’accède au compte.
- Certains services tiers nécessitent l’accès à d’autres contenus du téléphone, tels que les contacts ou les photos. Le personnel antiviolence doit vérifier si la survivante est d’accord pour partager cet accès et se préparer à un éventuel refus.
- Certaines applis/services de messagerie connectés aux contacts de la survivante informent les personnes de sa liste qui utilisent la même appli ou le même service de messagerie. La victime peut ne pas vouloir que les autres sachent qu’elle utilise une appli ou un service tiers. Renseignez-vous sur le type d’accès, de connexions et de partage automatique de l’appli et vérifiez s’il est possible d’éviter ces connexions et ce partage.
SMS d’urgence/lignes d’assistance
Dans certains cas, les organisations peuvent vouloir inclure les SMS comme moyen pour les femmes, les enfants et les jeunes de contacter une ligne d’assistance téléphonique 24/7. Les maisons d’hébergement peuvent le faire de manière plus sécuritaire en utilisant une plateforme SMS basée sur le web. Par exemple, la Coalition d’Ottawa pour mettre fin à la violence faite aux femmes a lancé le site https://pasbienottawa.ca/ (Pas Bien Chez Soi) en avril 2020 pour permettre aux femmes d’envoyer en toute sécurité des SMS à des services antiviolence.
Il est important d’investir dans une ligne de crise par SMS via une plateforme web, car les textos ne sont pas anonymes. La personne qui envoie des SMS ne peut pas cacher son numéro de téléphone (à moins d’utiliser un numéro virtuel, ce qui n’est pas courant). Par conséquent, l’organisation qui gère la ligne d’assistance ou de crise par SMS recueillera les numéros de téléphone mobile figurant dans les messages. Si le service garantit l’anonymat, l’organisation devra instaurer des politiques de confidentialité sur la manière dont elle recueille, conserve et supprime les informations. Les dossiers de facturation des organisations peuvent également contenir les numéros de téléphone réels associés aux SMS. Les maisons d’hébergement doivent adopter des politiques de confidentialité afin de déterminer qui peut avoir accès à ces dossiers de facturation et comment ils sont conservés.
Envisager de traiter les SMS de la même manière que les conversations téléphoniques
Les politiques de confidentialité peuvent prévoir de ne pas enregistrer ou conserver le numéro de téléphone ou les journaux de SMS d’une ligne d’urgence. Si le service d’assistance téléphonique n’enregistre pas et ne conserve pas les appels, les conversations par SMS peuvent être gérées de la même manière pour préserver l’anonymat et la vie privée.
Évaluation de la sécurité
Bien qu’une ligne téléphonique d’urgence par SMS ne soit pas toujours propice à un contact approfondi, les organisations doivent tout de même évaluer la sécurité et informer la survivante des ressources de soutien et les services de planification de sécurité. Quant à la confidentialité, le personnel peut informer la personne qui envoie le SMS des politiques de confidentialité de l’organisation, de protocoles incluant des déclarations obligatoires et des pratiques sécuritaires concernant les textos.
Pour soutenir le développement de politiques sécuritaires, HFC a rédigé le document Use of Technology Policy Template Guide for Women’s Shelters and Transition Houses (PDF, en anglais).
La violence fondée sur le genre facilitée par la technologie (VFGFT) fait partie d’un continuum de violence qui peut se produire à la fois en ligne et en personne. Si vous ou l’une de vos connaissances faites face à la VFGFT, vous n’êtes pas seule. Vous pouvez consulter hebergementfemmes.ca pour trouver une maison d’hébergement près de chez vous afin de discuter de vos options et de créer un plan de sécurité. Vous n’avez pas besoin de résider dans une maison d’hébergement pour accéder à un soutien et à des services gratuits et confidentiels.
Adapté pour le Canada avec la permission du Safety Net Project du NNEDV, d’après leur ressource Organization’s Guide for Texting.